1.
50 millions, n’est-ce pas déjà beaucoup d’argent?
Oui, mais ce seuil ne concerne pas que de l’argent déposé dans un coffre. Il inclut la valeur des entreprises, qui n’est pas liquide, comme des ateliers, des hôtels, des domaines agricoles. Ces actifs ne sont pas disponibles en cash. Il faut les vendre pour payer l’impôt.
2.
Est-ce que cette initiative va aussi toucher les habitants qui ne sont ni riches, ni héritiers?
Oui. Car ce sont les conséquences économiques indirectes qui vont impacter tout le monde :
– des entreprises locales cédées ou délocalisées → moins d’emplois, moins de stabilité ;
– des recettes fiscales perdues → moins de services publics, hausse d’impôts pour compenser ;
– un tissu économique affaibli → baisse de l’attractivité, effets en chaîne sur le logement et les prix.
➤ Même ceux qui ne sont pas directement concernés par l’impôt peuvent en subir les effets concrets dans leur quotidien.
3.
Cette mesure ne va-t-elle pas simplement améliorer la justice fiscale?
En apparence, oui. En réalité, elle crée une injustice économique : elle pénalise la transmission, pousse à la vente d’actifs locaux, fragilise les entreprises familiales et fait fuir les gros contributeurs. Ce n’est pas plus juste, c’est plus instable.
4.
Qu’en pense le Conseil fédéral?
Il a émis un avis défavorable, alertant sur les conséquences graves pour l’économie suisse, les finances publiques et la stabilité fiscale.
Selon ses estimations, l’initiative pourrait entraîner une perte de 2,8 à 3,5 milliards de francs par an en raison de départs massifs de contribuables.
5.
Est-ce que l’initiative générera plus de recettes fiscales?
Non. Selon le Conseil fédéral, l’initiative pourrait provoquer une perte de 2,8 à 3,5 milliards de francs par an. D’autres experts, comme le professeur Marius Brülhart (Université de Lausanne), estiment que 77 à 95 % du substrat fiscal ciblé pourrait quitter la Suisse.
👉 Plutôt qu’un gain, c’est un effondrement des recettes fiscales qui nous attend.
6.
Pourquoi Genève serait-elle la plus touchée?
Parce qu’un très petit nombre de contribuables finance une part massive du budget cantonal et donc des services publics.
À Genève, 1,3 % des contribuables paient 78 % de l’impôt sur la fortune, et 4,4 % assurent 53 % de l’impôt sur le revenu.
Si ces grands contributeurs s’en vont, c’est tout l’équilibre fiscal genevois qui s’effondre.
7.
Pourquoi ne pas simplement taxer les grandes fortunes sans toucher aux entreprises?
Parce que la fortune n’est pas forcément un compte en banque avec des liquidités. Souvent la fortune représente la valeur d’une entreprise qui n’est pas liquide : bâtiments, machines, personnel, etc. Il n’est pas possible de la séparer facilement. L’initiative force à liquider l’entreprise.
8.
Y a-t-il un risque pour les emplois?
Oui. Si une entreprise doit être vendue faute de pouvoir être transmise, les nouveaux propriétaires (souvent étrangers) peuvent restructurer, délocaliser ou supprimer des emplois. La stabilité locale est mise en péril.
9.
Pourquoi parle-t-on de patrimoine enraciné?
Parce que certains biens ne peuvent pas s’exiler : vignobles, hôtels, domaines, savoir-faire locaux. Ils risquent d’être vendus ou détruits. C’est un pan de notre culture et de notre histoire qu’on perd.
10.
L’initiative ne vise que les très riches. Pourquoi s’en inquiéter?
Parce qu’elle touche directement l’entreprise familiale dans sa substance, soit celle qui compose le tissu économique local. Une entreprise ou un domaine viticole peuvent valoir 50 millions sans générer de liquidités. Les auteurs de l’initiative veulent punir la richesse, mais dans la réalité ils menacent surtout la transmission de l’entreprise.
11.
Concrètement, qu’est-ce que Genève pourrait perdre si cette initiative passe?
Genève est particulièrement dépendante de quelques milliers de contribuables qui assurent une part énorme de l’impôt.
Si ces personnes quittent le canton ou cessent de transmettre leur patrimoine local :
– les impôts sur la fortune et le revenu s’effondrent,
– les prestations cantonales doivent être réduites,
– les domaines patrimoniaux sont vendus ou abandonnés,
– et les classes moyennes payent la facture à la place des exilés.
➤ À la fin, toute la population genevoise est perdante.
12.
Y a-t-il d’autres moyens de mieux répartir la richesse?
Oui : encourager l’investissement local, la formation, la mobilité sociale, la participation salariale. Mais punir la transmission ou confisquer à 50 %, ce n’est ni efficace, ni équitable.
13.
Est-ce qu’on exagère le risque de fuite?
Non. Ce n’est pas une menace théorique. Dans d’autres cas similaires, des fortunes ont effectivement quitté leur pays face à une fiscalité punitive. La Grande Bretagne et la Norvège sont des exemples récents. À Genève, où l’équilibre fiscal repose sur peu de contributeurs, le moindre mouvement a un effet immédiat.
À Genève, les départs de plusieurs grands contribuables ont déjà été annoncés en lien direct avec l’incertitude fiscale.
Certains partent vers des pays comme l’Italie, où la fiscalité est plus stable (forfait de 200’000 €/an).
14.
Genève est-elle vraiment exposée?
Oui, tout particulièrement.
À Genève, 1,3 % des contribuables paient 78 % de l’impôt sur la fortune, et 4,4 % assurent 53 % de l’impôt sur le revenu.
Ce modèle repose sur une base étroite… mais essentielle.
Une fuite, même partielle, de ces contribuables aurait des conséquences immédiates :
• Une perte directe de recettes fiscales qui mettrait en péril l’équilibre budgétaire du canton, déjà fragile.
• Une hausse probable des impôts pour la classe moyenne, afin de compenser le manque à gagner.
• Des coupes dans les prestations publiques : santé, culture, social, infrastructures.
• Un effet boule de neige économique : moins d’attractivité, moins d’entreprises, moins d’emplois…
et à terme, moins de logements construits.
➤ L’initiative semble viser les plus riches. Mais en réalité, c’est l’ensemble de la population genevoise qui risque d’en payer le prix.
15.
Que propose concrètement l’initiative « pour une politique climatique sociale »?
L’initiative prévoit d’introduire un impôt fédéral de 50 % sur les successions et donations dépassant 50 millions de francs, sur l’ensemble du patrimoine transmis.
Le produit de cet impôt serait affecté à la politique climatique, notamment à un fonds de transformation écologique, dans le but d’encourager des mesures de justice sociale et environnementale.
Derrière cette idée séduisante, se cache en réalité un mécanisme fiscal lourd, radical et centralisateur, aux effets déstabilisateurs pour les entreprises, les régions et les finances publiques.
16.
Pourquoi le Conseil fédéral recommande-t-il de rejeter l’initiative?
Le Conseil fédéral a émis un avis clairement défavorable, pointant :
• Les risques pour la stabilité fiscale du pays ;
• Les effets dissuasifs sur la transmission d’entreprises, notamment familiales ;
• Le danger d’exil fiscal des grands contributeurs, et donc de perte massive de recettes ;
• Une atteinte au fédéralisme fiscal, car cet impôt serait perçu par la Confédération et non les cantons.
Il estime que l’initiative compromet l’équilibre actuel entre justice fiscale, responsabilité individuelle et compétitivité économique.
17.
L’initiative va-t-elle vraiment toucher les ultra-riches… ou aussi les classes moyennes?
En apparence, seule une minorité très fortunée serait concernée.
En pratique, de nombreux patrimoines non liquides — PME, domaines agricoles, entreprises familiales — pourraient dépasser le seuil de 50 millions, sans pour autant disposer de cash.
Or, l’initiative ne fait aucune distinction entre fortune liquide et capital immobilisé.
Résultat : les héritiers seraient souvent contraints de vendre leur entreprise, leur outil de travail ou leur patrimoine enraciné pour pouvoir payer l’impôt.
Mais les conséquences ne s’arrêtent pas là :
• La vente forcée d’entreprises locales peut conduire à leur rachat par des groupes étrangers, qui
restructurent, délocalisent ou licencient.
• Cela menace les emplois locaux, les fournisseurs régionaux, les savoir-faire suisses.
• À terme, c’est l’ensemble du tissu économique qui s’affaiblit, avec moins de revenus fiscaux, moins
d’investissements, et moins d’opportunités pour la classe moyenne.
➤ Même si la classe moyenne n’est pas directement taxée, elle subit les effets en chaîne : perte d’emplois, recul du service public, hausse d’impôts compensatoires.
Ce n’est pas une redistribution. C’est un affaiblissement du tissu social et économique.
18.
Combien rapporterait cet impôt sur les successions?
Les estimations sont très incertaines et varient fortement selon les sources.
Les initiants annoncent une recette potentielle de 5 à 10 milliards CHF par an. Mais il s’agit d’un calcul brut, théorique, sans tenir compte des effets secondaires.
Effectivement, selon le Conseil fédéral, l’effet net global serait négatif : il estime que l’initiative pourrait provoquer une perte fiscale de 2,8 à 3,5 milliards de francs par an, liée à l’exil de nombreux contribuables fortement imposés.
➤ Conclusion : au lieu de générer de nouvelles ressources, cette initiative risquerait surtout de fragiliser l’équilibre fiscal du pays.
19.
Quels seraient les effets sur le fédéralisme et l’attractivité de la Suisse?
L’initiative introduit un impôt fédéral nouveau, prélevé directement sur les successions au-dessus de 50 millions CHF. Cela rompt avec la tradition suisse selon laquelle les impôts sur les successions relèvent des cantons.
Ce transfert de compétence fiscale vers la Confédération constitue un précédent inquiétant. Il affaiblit le pouvoir d’autonomie fiscale des cantons et menace la diversité des modèles fiscaux régionaux, qui font partie de l’attractivité suisse.
Combiné à un taux punitif de 50 %, ce changement affaiblirait durablement la compétitivité du pays.
20.
L’initiative stimule-t-elle vraiment le principe du pollueur-payeur?
Non. L’initiative ne repose pas sur le principe du pollueur-payeur.
Elle ne taxe pas les comportements polluants, mais la transmission de patrimoine au-delà de 50 millions de francs — quelle que soit son origine ou son impact environnemental.
Qu’il s’agisse d’une entreprise verte ou d’un actif polluant, le traitement est identique.
Par exemple une entreprise qui produit des trains écologiques serait autant touchée qu’une entreprise qui produit des plastiques.
Ce ne sont donc pas les pollueurs qui paient, mais les héritiers de fortunes — même lorsque ces fortunes sont enracinées localement, investies dans des activités durables ou créatrices d’emplois.
➤ L’invocation du pollueur-payeur est ici un habillage discursif, sans lien réel avec la logique de l’initiative. Ce n’est pas une écotaxe, mais un impôt de rupture patrimoniale.
21.
Que pensent les partis politiques de l’initiative?
L’initiative divise nettement l’échiquier politique :
• Le Parti socialiste suisse (PS) et les Verts soutiennent le texte, en mettant en avant la redistribution des
richesses et le financement de la politique climatique.
• Le PLR, l’UDC, le Centre, le PVL, ainsi que le Conseil fédéral, s’y opposent fermement.
Ils dénoncent une attaque contre l’entrepreneuriat suisse, une menace pour les finances publiques
cantonales, et une recentralisation fiscale contraire au fédéralisme.
➤ Même au sein de la gauche, des voix critiques s’élèvent : de nombreux élus socialistes ou écologistes de terrain — notamment dans les cantons où les finances sont fragiles — redoutent les effets de l’initiative sur la transmission d’entreprises, l’exil fiscal et la cohésion fédérale.
L’initiative ne fait donc pas l’unanimité, y compris parmi ses soutiens naturels, et fait l’objet de critiques transpartisanes. Beaucoup considèrent qu’elle va trop loin, trop brutalement, et qu’elle met en péril des équilibres essentiels pour la Suisse.
22.
Pourquoi la transmission est-elle un enjeu si important?
Parce que la Suisse s’est construite ainsi :
une génération transmet à la suivante ses valeurs, son savoir-faire, ses outils.
➤ La transmission, c’est ce qui assure la continuité de notre modèle.
➤ La rupture de la transmission, c’est la rupture de la Suisse telle qu’on la connaît.